Motion sur les déductions fiscales liées aux primes des caisses maladie

La motion, déposée le 8 mars dernier, est d’actualité. Toutes et tous les assurés sont d’ores et déjà aux abois pour savoir à combien se chiffrera l’augmentation des primes des caisses maladie pour 2018. L’année dernière, en 2017, elle était de 5.8%… en 2018, selon, Santésuisse, elle devrait se monter entre 4 et 5%.

Ces chiffres, pour abstraits qu’ils puissent paraître, ont une résonance particulière pour les contribuables qui devront débourser à nouveau davantage pour honorer leurs factures mensuelles des primes de caisses maladie. Chaque année, depuis l’an 2000, les primes augmentent pour passer, pour une famille d’un couple et de trois enfants,  de Fr. 9’000.- en 2000 à Fr. 20’000.- en 2017, soit 120% environ.

Il est évident que le salaire moyen en Suisse n’a pas augmenté de 120% depuis l’an 2000 !!! Donc nous vivons actuellement une période marquée par une perte du pouvoir d’achat de la classe moyenne, celle qui ne touche pas de subventions pour les primes LAMAL. Sachant que plus de 22’000 personnes dans le canton du Jura bénéficient d’une aide pour faire face aux coûts des primes des caisses maladie, nous sommes en droit de nous poser des questions fondamentales sur les coûts de la santé en Suisse et leurs conséquences sur la vie quotidienne de ses habitants.

Si les primes LAMAL sont passées de Fr. 9’000.- à Fr. 20’000.- par année entre 2000 et 2017, nous constatons que les déductions fiscales, quant à elles, n’ont pas suivi la tendance à la hausse de l’augmentation des primes.

En 2000, la famille de notre exemple payait, après déductions fiscales, Fr. 3’922.- annuellement ; en 2017 elle paiera Fr. 10’716.-, soit près de Fr. 6’800.- de plus, soit 173%. Durant cette période, l’indice des prix à la consommation (IPC) a été de 6.8%. Incontestablement il y a un grave dysfonctionnement entre le coût réel des primes LAMAL et les salaires perçus par les Suissesses et les Suisses.

D’où le mal provient-il ? Pour comprendre cette problématique il faut simplement s’informer sur le site de l’Office fédéral de la statistique (OFS) qui calcule chaque mois l’indice des prix à la consommation. Or, les primes des assurances-maladie ne sont pas prises en compte dans le calcul de l’Indice des prix à la consommation (IPC). Pourquoi donc ? l’OFS nous explique que les primes de l’assurance –maladie correspondent à des transferts versés aux assurances par les ménages privés. En cas de dommages, ces versements (donc les primes) sont restitués aux ménages en guise de réparation. Le vocabulaire utilisé est risible et surtout inhumain. L’Etre humain est considéré comme un objet qu’il faut réparer de temps à autre, comme une voiture ou une maison qui a pris feu…

Ainsi donc les primes des assurances maladie ne sont pas prises en compte dans le calcul de l’IPC.

En mai dernier, un conseiller national PDC du Tessin,  M. Fabio Regazzi, a fait accepter une motion au Conseil national, par 120 voix contre 53. Sa motion demande que les Suisses puissent déduire complètement ( !) leurs primes d’assurances maladie des impôts. Le conseiller national a proposé notamment que les personnes qui perçoivent un salaire annuel de moins de Fr. 150’000.- devraient pouvoir déduire la totalité des primes de l’assurance maladie. Quelle aubaine pour la population, mais quelle catastrophe pour les finances publiques ! Aucun canton ne pourrait appliquer un système de ce type tant les entrées fiscales seraient réduites à peu de choses. Il faudrait alors compenser ce manque à gagner de l’Etat par une augmentation drastique des impôts, sinon procéder à des coupes sévères dans les dépenses.

Bien qu’acceptée par deux contre un au Conseil national, la motion Regazzi se révélera inapplicable. Un constat s’impose : nous constatons que les conseillers aux Etats et au Conseil national ne sont pas en adéquation avec la réalité du terrain et des problématiques des communes et des cantons.

Revenons donc à la motion déposée au Parlement jurassien par laquelle nous demandons d’abroger l’article 31, alinéa d de l’ »Arrêté portant adaptation des déductions et des tarifs de la loi de l’impôt aux effets de la fluctuation de l’indice des prix ». Pour remplacer cet article, nous proposons d’introduire un article qui adapte automatiquement les déductions fiscales au seul renchérissement des primes des assurances maladie.

Pour l’Etat jurassien, les communes et les paroisses, la perte fiscale serait moindre et acceptable. En admettant que, pour 2018, les primes des assurances maladie augmentent de 5%, les déductions fiscales de notre famille de 5 personnes pourraient se monter à Fr.  9’800.- pour 2018, en lieu et place de Fr. 9300.-. Précisons ici qu’en 2017 les déductions fiscales ont été réduites de Fr. 50.- pour les adultes en raison d’un IPC négatif !!!

Finalement et en conclusion, la motion que nous vous demandons d’accepter va dans le sens d’un soutien aux familles surtout face à l’augmentation des primes des assurances maladie. Il s’agit bel et bien d’un geste significatif en particulier dans un contexte où les interrogations ne cessent de croître vis-à-vis des coûts de la santé en général, et des primes des assurances maladie ; est-ce que l’on ne  nous promet pas un doublement des primes d’ici à 2030 ?

 

Jean-Daniel Tschan

Député PCSI

Le 6 septembre  2017

 

Primes 2001-2016

2000 2006 2011 2017 2000-2017 2011-2017
SUISSE 211.68 306.41 373.8 447.28 111.30% 19.70%
JURA 237.61 333.63 379.84 488.09 105.40% 28.50%
Famille
couple + 475.22 667.26 759.68 976.18
3 enfants
(2 moins de 18; 123.42 163.74 174.54 216.14
1 en études) 149.08 282.33 349.54 463.22
Coût Lamal /an 8972.64 13359.96 15405.12 19866.48 121.40% 29%
déductions fiscales 5050 7550 8020 9150 81.18% 14.10%
à charge de la famille 3922.64 5809.96 7385.12 10716.48 173.17% 45.10%
*le taux d’inflation de 2000 à 2016 a été de 7.8%
**pour les personnes qui ne sont pas assujetties au 2ème et/ou au 3ème pilier une déduction de Fr. 530.- est acceptée
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